dimanche, 03 septembre 2006
"Rien de tel qu'un enfant pour vous mettre dans le bain du monde." Christian Bobin
En se réveillant de la sieste, la fillotte:
"Does the world go on always?" Le monde continue-t-il toujours?
"What do you mean?" Qu'entends-tu par là?
"What happens when everybody is dead?" Que se passe-t-il quand tout le monde est mort?
"Well you know sweety, it can never happen, people die every day but there are also always new babies who are born every day. So there is always people. Why do you ask?" Tu sais chérie, ça ne peut pas arriver, il y a des gens qui meurent tous les jours mais il y a aussi des bébés qui naissent tous les jours. Alors, il y aura toujours quelqu'un. Pourquoi cette question?
"..."
"Why do you ask, it's important that you tell me." Pourquoi me poses-tu cette question, il faut me le dire.
"I don't want to talk about it." Je n'ai pas envie d'en parler.
"Did you have a nightmare?" As-tu fait un cauchemar?
"I don't want to talk about it." Je n'ai pas envie d'en parler.
"Why not? It would make you feel better to talk about it. What did you dream about?" Pourquoi pas? Si tu en parles tu te sentiras pourtant mieux. De quoi as-tu rêvé?
"I dreamt that you died" J'ai rêvé que tu mourrais. sanglots
"Well, look at me, I am not dead." Tu vois, je ne suis pas morte. Je prends sa main, je lui souris.
Elle sanglote toujours, je conduis, je ne peux pas la prendre dans mes bras, juste lui serrer la main.
"But I don't want you to die..." Mais je ne veux pas que tu meures...
"You know I love you and you love me, so no matter what happens, I will always be in your heart. I can not tell you that I will not die someday, that would be lying and I love you too much to lie to you. But I can tell you that when people share so much love, they always stay in each others heart. You know I love you, don't you?" Tu sais je t'aime et tu m'aimes, alors peu importe ce qui arrivera, je serai toujours dans ton coeur. Je ne peux pas te promettre que je ne vais pas mourir un jour, ça serait un mensonge et je t'aime trop pour te mentir. Mais quand on partage un tel amour, on reste toujours dans le coeur l'un de l'autre. Tu sais que je t'aime n'est-ce pas?
"Yes, I know but I don't want you to die." Oui, je sais mais je ne veux pas que tu meures.
"Then I will always be in your heart." Alors je resterai toujours dans ton coeur.
"And if you die and when I die, we will always be together" Et si tu meures, quand je mourrais aussi on sera réunies pour toujours?
"I don't know, sweety, it is a possibility. But remember, love is what really counts and I will always be in your heart because I love you." Ça je ne sais pas, chérie, c'est possible, mais souviens toi ce qui compte vraiment c'est que je serai toujours dans ton coeur parce que je t'aime.
Je ne sais pas ce que c'est que de porter un enfant. Je ne sais pas ce que c'est qu'aimer un enfant à qui l'on a donné la vie. Je ne me fais pas d'illusion sur le fait en tant que mère adoptive que je ne suis qu'une remplaçante et que je ne peux me suppléer à l'amour que ces enfants n'ont pas reçu de leur mère de naissance. Je sais que cette discussion, même si elle me touche profondément ne confirme pas son amour pour moi, mais qu'elle a vraiment peur d'un nouvel abandon et que c'est une peur que je ne puis apaiser, même avec tout mon amour. Quand on choisi d'adopter des enfants qui ne sont plus des nourrissons, on ne le fait pas en espérant un jour être aimé d'eux, on le fait en espérant juste qu'eux apprendront à se laisser aimer. Le seule chose dont on puisse être certain, c'est de l'amour qu'on leur porte. Mieux vaut ne pas se faire d'illusion sur celui qu'ils nous portent en retour. Il est fort probable qu'à l'adolescence, ils nous rejettent complètement et qu'ils partent à la recherche de leurs origines. Alors, on se contente, modestement, de jouir des témoignages de tendresse dont ils sont capables, et surtout on travaille dur pour essayer de réparer les dégâts.
On pourrait facilement croire que leurs comportements viennent de ces premiers mois, ces premières années gâchés et que c'est à eux de faire un travail sur eux-même pour modifier leurs mauvais réflexes. On s'aperçoit cependant vite, avec un peu d'aide spécialisée, qu'en fait ce sont nos réactions en tant que parents par rapport à ces comportements qui les perpétuent, voir qui les induisent. Les parents non adoptifs devraient aussi en prendre conscience. Si même des enfants avec un passé souillé ne sont que des miroirs pour les émotions de parents adoptifs alors on peut imaginer que l'effet est démultiplié quand l'enfant a eu un début de vie normal. Quelqu'un qui compte beaucoup pour moi me confiait l'angoisse de sa fille par rapport à la rentrée. Ma première question fut de comprendre quelle exigence de performance la mettait sous une telle pression qu'elle était incapable de prendre du plaisir à retrouver ses amis. Il ne confirmait pas cette exigence tout en disant que c'est vrai qu'il n'était probablement pas aisé de suivre ses aînés très brillants...Et puis en creusant, il a eu un conflit tout l'été avec son épouse pour que la petite s'entraîne à certains exercices, ce qu'il refusait, afin qu'elle prenne l'habitude d'un nouvel instituteur qui fait faire ce genre d'exercices. Imaginons dans la tête d'un enfant..."Ils me disent que ça n'est pas important d'être bonne en classe, mais ils encensent mes aînés quand ils réussissent et Maman veut que je passe mes vacances à m'entraîner pour l'année à venir." Que croyez-vous que cette gamine va croire, ce qu'elle entend, ou les actes dont elle est témoin. Ça n'est pas à elle de prendre conscience de ses peurs et de les dompter, mais bien à ses parents de comprendre qu'ils en sont la cause et de modifier leurs comportements pour l'aligner avec leur discours. S'ils ne parviennent pas à le faire seuls, alors il leur faut chercher de l'aide.
Quand je puise au plus profond de mon coeur pour répondre aux agressions verbales, parfois physiques de du fillot par des sourires et des mots d'amour, je ne lui renvois pas la réaction qu'il est en droit d'attendre et petit à petit, il finit par me renvoyer celle que j'induis en lui. Mais c'est en fait, la petite Pitchoune, le caniche nain que nous avons adopté avant d'avoir les enfants qui me l'a appris en premier. Elle avait été maltraitée la petite Pitchoune, et pour cause, elle se croyait l'alpha et faisait tout pour faire tourner le monde autour d'elle. Le plus désagréable étant de pisser et chier partout, de préférence juste après ses sorties, pour manifester son contrôle. Elle volait aussi. Le Prince devenait fou, punissait toujours plus fort et elle se rebellait toujours plus. Finalement, nous en avons beaucoup discuté et nous nous sommes dit qu'il fallait trouver un moyen de sortir du cercle vicieux. Et que comme c'était un chien, ça n'était pas elle qui pouvait s'adapter mais bien à nous de trouver une solution. Nous avons donc mis en place un programme de suppression de toutes les occasions de faire des bêtises. Sans les conditions, elle ne pouvait plus manifester sa rébellion et s'est aperçu qu'elle était beaucoup moins punie, et beaucoup plus choyée. En quelques mois, nous avons éliminé ces comportements de retaliation. Comme dans un roman de John Irving, Pitchoune , surtout ce qu'elle nous a appris, était l'une des conditions nécessaires pour être prêts à bien nous occuper de ces enfants. N'empêche que je suis partie tout de même avec un terrible handicap, étant moi aussi RAD (Reactive Attachment Disorder), mais comme la fillotte du type résilient. Si je l'avais compris, je ne suis pas certaine que j'en aurai accepté les conséquences. En tout cas, rien ne me vient naturellement et je dois sans cesse prendre conscience de mes réactions spontanées et tenter de les contrôler pour ne pas traumatiser plus ces petits qu'ils l'ont été déjà bien suffisamment. C'est un gros effort, mais je crois qu'au bout du compte il me reconstruit, et que tout cela a un sens, car ces enfants me sauvent certainement aussi de moi...
02:05 Publié dans Amour, Blog, Vivre | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : citation, attachement, adoption, amour, songe, espoir, solitude
Commentaires
" Prendre un enfant par la main
Pour l'emmener vers demain,..."
http://fr.lyrics-copy.com/yves-duteil/prendre-un-enfant.htm
bon dimanche :-)
Écrit par : temporel | dimanche, 03 septembre 2006
Bravo ! tu une excellente maman et une merveilleuse femme :-)
Écrit par : !!! | dimanche, 03 septembre 2006
Merci temporel, c'est une lourde responsabilite...
Écrit par : Aude | dimanche, 03 septembre 2006
Merci !!!, je ne suis rien de tout ca. Si j'etais une bonne mere, tout ceci me viendrait naturellement. Quand a etre une femme merveilleuse, ce n'est qu'une idealisation...
Écrit par : Aude | dimanche, 03 septembre 2006
joli geste d'amour
respect [...]
Écrit par : Céphée | dimanche, 03 septembre 2006
Pas d'accord avec ton commentaire réponse à !!!
Personnellement, je n'ai pas encore trouvé la définition de la bonne mère.
J'ai beaucoup aimé ton texte : la réflexion que tu as eu, peu de femmes y arrivent, qu'elles soient mères biologiques ou d'adoption d'ailleurs, peu importe. En revanche tu observes beaucoup et tu modifies ton comportement en fonction de tes conclusions. Ton adaptation est ce qui va te rendre plus attentive aux sentiments exprimés par tes enfants. C'est cette faculté-là notamment que je trouve superbe.
Écrit par : La grande Loulou | dimanche, 03 septembre 2006
Merci Cephee, c'est une bonne synthese...Peut-etre est-ce cela l'Amour, les gestes que l'on est capables de faire pour l'être aimé...
Écrit par : Aude | dimanche, 03 septembre 2006
Merci La grande Loulou. C'est lorsque l'on prend conscience de l'étendu de sa responsabilité dans l'évolution de l'enfant qu'on devient capable de prêter attention aux signes plus qu'aux échanges. Et lorsqu'on se met à réagir aux signes, alors on peut établir un autre niveau de communication. Je me sens tout de même toujours aussi mal "équipée" et étrangère à ce rôle...
Écrit par : Aude | dimanche, 03 septembre 2006
La vie prend des chemins innatendus. Nul ne sait vraiment lequel mène à Rome, et parfois, quelques chemins de traverses sont absolument purs. Le temps que l'on se donne n'y change rien, les rencontres sûrement.
Écrit par : Pyrome | dimanche, 10 septembre 2006
Oui Pyrome, il faut suivre la lumière de son intuition et rester flexible.
Écrit par : Aude | dimanche, 10 septembre 2006
Bonjour Aude
oui vous le soulignez c’est bien nous qui transmettons nos angoisses, nos défauts à nos enfants mais être mère ce n’est pas juste avoir porté l’enfant au creux de soi, nous les pères ne portons rien et le sommes pourtant, c’est l’amour comme vous le dites qui donne le droit de dire c’est mon enfant, qu’importe sa quête future vers une recherche de vérité, c’est au quotidien que vous lui aurez bâti ses fondations, et puis si sans le vouloir nous leur léguons nos erreurs qu’importe pourvu que nous restions nous-mêmes car le sentiment de culpabilité se sent et se transmet aussi, juste être soi puisque nous savons et vous le dites si bien qu’un jour ils prendront leur envol – ce qui me touche dans ce dialogue avec votre fille, c’est votre franchise aux questions métaphysiques qu’elle vous pose, et cela aussi vous lui transmettez et c’est l’essentiel – vous n’êtes pas mal équipée, vous êtes femme avec ses peurs et ses doutes mais n’est-ce pas de cela qu’est fait la matière humaine ?
Écrit par : daniel | lundi, 18 septembre 2006
Merci daniel, un etre qui n'a lui meme pas recu les bases est forcement mal equipe, mais j'apprends chaque jours et ils m'aident a trouver la paix et a y rester...
Écrit par : Aude | lundi, 18 septembre 2006
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